De Toupah

Mars 2015

Jean Michel et Chantal bonjour,

 

Je te remercie pour ton message porteur de bonnes nouvelles, d’ouverture et de découvertes. 70 personnes inscrites pour le repas, c’est bien ! et vous souhaite une journée de convivialité et de partage*. Je serai en union avec vous.

 

A Toupah, le service des enfants se remplit au fur et à mesure. Après les fêtes sont arrivés des petits très anémiés qui sont décédés :

Aldarra 20 mois 4kg impressionnant de maigreur, Peul Burkinabé découvert dans un campement de Divo, la maman ne lui donnait que le sein qui ne produisait plus de lait ! Marie 18 mois malnutrie, emportée par la fièvre typhoïde

Grâce 3 mois : c’est au retour d’une mission que le père a découvert sa fille souffrant de la faim, délaissée par sa mère qui présentait des troubles cérébraux. J’ai accompagné la dernière petite de 4 mois

Grâce Emmanuella jumelle, jusqu’à son village de pêcheurs, en bordure de la lagune Ebrié (un cadre magnifique) une triste situation familiale : une maman rejetée par son ami et sa propre famille. Finalement, elle va rejoindre un oncle à Abidjan avec la jumelle en forme.

Mais en ce moment, nous avons des triplés de 2 mois : David-Pierre Xavier et Béatrice d’un poids satisfaisant et toniques. Ils sont les 8éme, 9éme et 10éme de la famille. La maman est battante, le papa est pêcheur à Grand Lahou. Ils sont heureux de cette surprise car ils en attendaient seulement 2… accouchement à la maison en plus…

Ici ce qui prime, c’est la joie d’être mère, de se retrouver en famille ensemble. Ce qui est demandé, c’est de pouvoir manger tous les jours, de pouvoir se soigner. Les gens simples n’ont pas de grandes ambitions. En milieu rural, la terre est leur richesse. Attachés à leur village natal, à leurs traditions, ils n’envient pas les gens des villes.

 

En catéchèse, nous préparons avec des laïcs les catéchumènes au baptême et à l’eucharistie pour la nuit pascale. Sur un groupe de 12, 3 vont également se marier chrétiennement. 3 ne savent ni lire, ni écrire. 2 sont d’origine musulmane : Oumar et Aïcha. L’un d’eux est infirmier à Toupah et j’aime bien discuter avec lui. Il veut modifier son prénom car celui qu’il porte actuellement lui a été donné par le responsable de la secte « la rose croix », secte où ses parents sont très engagés. C’est un gars réfléchi, paisible, souriant, attaché à la Bible et ouvert au partage.

Cette secte qui regroupe les gens aisés et bien placés socialement, réclame le sang humain pour les sacrifices. Il faut en passer par là pour devenir riche. Nos hommes politiques sont très présents à cette réalité. La sorcellerie, c’est le mal grave de notre pays ; on passe des pactes avec le diable pour avoir de l’argent et devenir puissant. Cela demande de tuer, d’empoisonner un ami, une personne de ta famille, celle à qui tu tiens le plus. Et ici, il n’y a pas de justice. Cette secte se repère à Dabou, à Adzopé par le panneau AMORC qui indique une salle de réunion. Aussi, en nous rendant dans les villages pour les célébrations du dimanche, nous remarquons que certaines personnes vivent dans la peur, la méfiance. Alors j’en profite pour offrir et faire prier la prière  « Auguste Reine ».

A 10 kms d’ici, Daniel a perdu son frère aîné de 45 ans empoisonné. Il venait d’acheter quelques ha supplémentaires d’hévéas. La jalousie ? Daniel qui a la charge maintenant des 3 épouses de son frère et des 9 enfants, me confiait : « j’ai peur, mes affaires ne marchent plus très bien. L’argent me manque pour nourrir ma famille. »

A Toupah, nous avons vécu un drame, la semaine dernière, comme l’histoire de Caïn et d’Abel. La jalousie pour un gars de 14 ans qui a enceinté l’une des 2 amies de 16 ans. Après une dispute, l’amie a préparé du poisson empoisonné (poudre pour souris et produit toxique pour l’hévéa). Le bébé est mort, décomposé dans le ventre de sa mère et la maman a suivi. 2 filles analphabètes !!! C’est bien triste. Quand l’école sera-t-elle obligatoire pour tous ?

 

A l’occasion du Carême, chaque année, nous vivons une journée de pèlerinage. Chaque pélé rassemble 200 enfants, jeunes ou adultes. Tout en priant le chemin de la croix, nous marchons en équipes à travers les palmiers ou les hévéas sur 3 à 4 kms. La prière est guidée par le carnet que nous confectionnons. A l’arrivée dans le campement, chaque équipe réfléchit sur un fait de vie (cette année : les martyrs de l’Ouganda) à l’aide de questions et la Parole de Dieu, Actes 20 : « selon St Paul, quel est le rôle d’un missionnaire ? » mise en commun-un temps d’animation avec les tambours burkinabés et les calebasses garnies de coquillages-Eucharistie-pique-nique. Ce pélé renforce l’amitié en Eglise et fortifie les liens dans les CEB (églises de quartier). Nous nous retrouvons en CEB tous les mercredis soir 1 heure.

 

Nous nous acheminons vers la Béatification du Fondateur.

Les 11et 12 avril, un WEnd de récollection nous aidera à  « redécouvrir le dynamisme du P Cestac pour aujourd’hui » et le dimanche de Pentecôte, un rassemblement entre Sœurs Servantes de Marie à Adzopé fêtera l’événement.

Le 30 mai, nous espérons des sketchs, danses, chants à Toupah et le 31 mai, la cté animera la messe de la Visitation avec d’autres. Nos amis Ivoiriens sont pleins d’idées, mais un peu lents dans la réalisation. Alors parfois, je m’impatiente et doute de leurs promesses.

 

Avec mon amitié et mes remerciements anticipés pour votre action missionnaire.

 

Je salue chaque membre du bureau et l’ensemble des amis du secteur de Bouchain et vous garde dans ma prière.

 

Marie-Agnés

Toupah, 18 mars 2015

 

(*) Repas-partage organisé le dimanche 22 mars, salle Jeanne d’Arc à Bouchain, par l’association Saint-Martin Partage de Vie, en partenariat avec le CCFD.
 

Article publié par MICHEL LAISNE • Publié le Vendredi 27 mars 2015 • 2002 visites

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