LA JOIE DE CROIRE,
il nous faut la libérer pour « INVENTER LES PAROISSES DE DEMAIN »,
le thème de ce Synode.
Aller à la rencontre des 4 participants douaisiens au Synode interdiocésain promulgué solennellement à Lille le 27 Septembre a revêtu l’aspect d’une enquête. Le Synode c’est quoi ? Les intervenants sont qui ? A travers ces témoignages on découvre leurs perceptions propres mais aussi un long labeur collectif qui, à son terme, laisse exploser sa joie et son espérance. Ainsi Robert Carémiaux, Michèle Turpin, Dominique Fontaine et André Merville ont soulevé le voile d’un Synode qu’ils ont vécu pour nous. Ils s’y sont engagé corps et âme.
Une explosion de la joie de croire à nous faire partager. Photo François RICHIR aimablement transmise par Croix du Nord Croix du Nord n° 2403 du 6 au 12 Février |
Le Synode ou concile (assemblée en grec et en latin) est une longue tradition dans l’Eglise. Ici il s’agissait d’une assemblée consultative réunie au niveau de la Province ecclésiale de Lille, Cambrai et Arras.
Avec Robert Carémiaux, diacre permanent de longue date, on découvre que la participation des trois diocèses, Arras, Cambrai et Lille, le synode devient un évènement d’une autre dimension, plus conciliaire, c’est-à-dire un échelon de plus dans l’universalité de l’Eglise. Si c’est le 6ème concile interdiocésain au monde, c’est le premier en France. A ce titre il éveille la curiosité. Il nous fait découvrir tous les aspects du travail des commissions, des assemblées et des sessions et son impressionnante organisation, non pas pour brider la parole mais au contraire pour permette au plus grand nombre de s’exprimer, en la formalisant de manière plus rigoureuse avec l’aide de l’équipe de pilotage. En 5 minutes montre en main, il est possible de formuler une pensée construite. Les commissions élaborent des propositions soumises au vote de l’Assemblée. Selon le résultat, elles sont retenues aux 2/3 des votes, sinon à « reformuler ». Déjà un minimum de parité était bien perçu, mais un élan supplémentaire a été donné par Rome à la demande des 3 diocèses, en élargissant sensiblement les droits de vote au-delà des membres de droit. Si la parité a été respectée, est-ce le fruit d’une intention volontariste ou la résultante naturelle d’une réalité ecclésiale ? Robert observe une parité, non seulement entre hommes et femmes, mais aussi entre laïcs et clercs ou consacrés.
Au plan personnel Robert s’est senti fortement impliqué dans son propre ministère de diacre où il s’agissait de comprendre la fonction proprement ministérielle au côté du prêtre, en cas de demande de celui-ci et l’engagement dans le milieu où le diacre a été appelé. Il formule déjà ce qui sera commun à tous les participants selon leur langage propre, l’importance de la prière, la richesse de l’Église qui n’est qu’une somme de pauvretés et un immense souci, à la fois confiant au sens de la foi, mais angoissant quant à la responsabilité dans la mise en œuvre…qui de toute manière prendra du temps.
Synode interdiocésain Arras, Cambrai, Lille
Thème général : Inventer les paroisses de demain Participants : 3 évêques entourés de 190 prêtres, diacres, religieuses, laïcs hommes et femmes.
4 sessions : Consultations préalables en 2012 et 2013 1ère session 14 et 15 Décembre 2013 2ème session 29 et 30 Mars 2014 3ème session 11 et 12 Octobre 2014 avec votes 4ème session 31 Janvier et 1er Février 2015 avec votes et clôture
4 thèmes de mise en œuvre à promouvoir: Chapitre 1 : Mission Chapitre 2 : Proximité Chapitre 3 : Communion Chapitre 4 : Participation
16 équipes de 12 environ 59 propositions retenues sur 10 000 formulées 6 innovations retenues sur 12 proposées
Promulgation des Actes du Concile Provincial de Lille
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Avec Michèle Turpin, c’est le poids mais aussi la dynamique de la responsabilité qui la stimule. 5 ans au Service du Catéchuménat mais appelée à la responsabilité de l’initiation Chrétienne qui regroupe catéchuménat et catéchèse adultes, enfants et adolescents. Elle animait des ateliers, en particulier le n° 6 dont la réflexion assignée était celle des « prêtres ». Inventer les paroisses de demain. L’image du curé isolé seul maître à bord sur un territoire autour de son clocher n’est plus tenable. Desservir plusieurs clochers éparpillés sans chacun beaucoup de paroissiens, où l’isolement est devenu solitude invite à repenser le territoire, le ministère en équipe, la délégation, le déplacement de l’autorité. Qui porte la charge ? Sans remettre en cause l’autorité presbytérale, il semble nécessaire de la « replacer ». Les délégations pour les missions sont à harmoniser, proximité et périphérie sont mises en tension.
Michèle Turpin se sentait déjà portée depuis plusieurs années par un vent nouveau pour les missions qu’on lui avait confié. Elle confirme que les méthodes profanes et professionnelles ont produit un confort dans l’efficacité et une disponibilité à l’Esprit Saint, à la prière et aux célébrations. C’est de cette maturation qui a pris du temps qu’il a été possible de véritablement libérer une parole inventive et ne plus se sentir prisonnier d’habitudes, parfois de scléroses et de préjugés. « On a mis du temps à se laisser aller, à lâcher prise, on était créatif certes, mais dans l’existant et non dans la nouveauté. La libération est venue aux 3ème et 4ème assemblées. Là on a senti de l’innovation et certainement de l’Esprit-Saint à l’œuvre ». Une impression de cohérence demeure avec des perspectives d’exhortation pratiques : modifier nos représentations, repréciser nos critères de participation avec un projet pastoral où chacun peut prendre part, travailler tous les corps paroissiaux comme signe et source de communion. Donner à voir et à entendre la « joie de croire ».
Dominique Fontaine avait été conviée comme consultante. Elle enseigne au CIPAC (Centre Interdiocésain de formation à l’animation pastorale) de Lille, Cambrai, Arras. Son rôle était donc d’apporter son expérience et ses compétences en animation et à ce titre n’ouvrait pas au droit de vote. La décision romaine de lui accorder le droit de vote fut donc pour elle une heureuse surprise mais en même temps cela ne faisait qu’aller jusqu’au bout d’une réalité de ce qui se passait effectivement sur place. « J’étais au service d’une animation des idées des autres, avec un immense respect de la liberté de parole de chacun. On était accoucheur de quelque chose qui ne nous appartient pas, cependant, dans mon rôle j’avais un moment à moi. J’avais la parole et je m’exprimais sur le thème en cours, avec certes mon expérience professionnelle mais aussi comme mère de famille et animatrice de groupe Bible ».
Une photo de l’Assemblée conciliaire. Le symbole de la disposition conciliaire comme signe de travail, de prière, d’espérance et d’universalité dans la chapelle de Merville. |
L’enquête pour être complète nécessitait la parole du Père André Merville doyen de Douai lors de sa participation au synode mais appelé depuis à un nouveau ministère à Raismes. « On a vite senti que nos questions avaient un terreau commun pour nous faciliter l’entrée en dialogue où n’apparaissait plus la nécessité de s’identifier d’avantage comme prêtre ou diacre, de représenter une fonction ». L’élargissement du corps électoral semble s’être imposé naturellement comme reflet d’une réalité de terrain. La parité lui a semblé effective, les échanges finissaient par être très riches partageant en profondeur tout le vécu des engagements pastoraux de chacun. Au fil des sessions un cheminement s’opérait nourrit spirituellement par la parole de Dieu dans des célébrations de grande qualité. Le père André a participé à toutes les commissions, profitant de la faculté de choisir un thème à chaque session. Son centre d’intérêt s’est donc porté entre autres sur l’action missionnaire et qu’il puisse y avoir des ministres et des laïcs chargés ensemble comme envoyé spécial avec une lettre de mission collective, dans un secteur déchristianisé. Il fut non seulement fier mais heureux que sa proposition ait été votée et retenue pour être promulguée. Le Père André souligne là encore que la promulgation n’oblige pas, mais propose. Empruntes de réalisme les formulations sont facilement compréhensibles. Tout n’est pas possible partout et tout de suite. Là encore donc il y a respect de la liberté en Eglise.
Chacun à sa manière non sans espérance mais aussi avec un peu d’appréhension, a manifesté une préoccupation forte pour la mise en œuvre, ce qu’on appelle dans le jargon, la réception. Les lourdeurs trop humaines au niveau du terrain ont été à plusieurs reprises regrettées et des comportements sont certainement à changer, mais dans la patience. C’est sans doute pour cela aussi que dans l’esprit de chacun cela mettra du temps.
En conclusion, la question nous est désormais directement adressée :
le Synode, pour nous, ce sera quoi ?
Bruno Bidoire