Intervention de l'abbé Michel Masclet

Soirée de présentation du livret « La route qui nous change ! »

 

PLAN SIMPLE

 

I. Que savons-nous de l’évangéliste Marc ?

1. Qui est l’auteur ?
2. Quand a-t-il été écrit ?
3. Où a-t-il été écrit ?
4. Pour qui a-t-il été écrit

 

II. La dynamique de l’Évangile de Marc

1. Un plan selon l’espace
2. Un plan selon ce qui est annoncé par Marc lui-même dans le verset 1
3. Un plan qui ferait référence aux rapports entre les personnes

Note spéciale : la finale de l’Évangile de Marc

 

 

 

PRÉAMBULE : LES ÉVANGILES ÉCRITS


Comme une enquête à mener ensemble ce soir.
Sur la base d’hypothèses.
Un instantané déjà dépassé par la recherche.

 

  • Jusqu'aux années 65, la prédication sur Jésus est orale.
    Il y a eu certainement quelques écrits primitifs.
    La rédaction des Évangiles va s'étaler jusque 100 probablement.

 

  • Luc 1,2 - 3 dit clairement qu'il n'y a plus de témoins oculaires vivants quand il écrit son Évangile, bien qu'il puise chez eux.
              Ouverture de Luc ‘Théophile’ 1,1.

 

  • Les Évangiles sont rédigés non dans un ordre chronologique mais selon une logique propre à chaque évangéliste qui correspond à la communauté destinataire de l'Évangile.

 

I. QUE SAVONS-NOUS DE L'ÉVANGÉLISTE MARC ?

Introduction

 

L’évangile de Marc : « un monde de conflits, de suspense, d’énigmes, de secrets, de questions, de renversement des évidences, d’ironie et de surprises », selon l’expression de Camille Focant(1) !

 

Nous entrons donc un univers complexe qui mérite quelques repères …

Bien que présenté en second dans la Bible, Marc est, sans nul doute, le plus ancien des évangiles. Aussi, Marc peut-il être considéré comme l’inventeur d’un genre littéraire nouveau « l’évangile ». Jusque là, les communautés ne disposaient que des lettres pauliniennes et de quelques récits fragmentaires écrits.

 

L’évangile est une création chrétienne originale qui est à l’articulation d’un récit biographique, d’un témoignage et d’une annonce :

  • le récit d’un événement …exorbitant !
  • le témoignage engagé, enraciné dans la foi des premières communautés.
  • l’annonce de leur expérience du Christ ressuscité à travers le récit qu’il nous propose.

 

L’évangile – du grec eu-angelion qui signifie "bonne nouvelle" – proclame la Bonne Nouvelle de Dieu, du Vivant. Ce n’est pas un reportage scientifique, ce n’est pas une biographie telle qu’on peut l’entendre aujourd’hui.

Les Évangiles ne sont ni des procès-verbaux, ni une biographie exacte. Leur objet de conduire les lecteurs et auditeurs à la foi en Jésus. Les évangiles sont kérygmatiques : proclamation et profession de foi. Il s'agit d'ouvrir au royaume de Dieu !

1. Qui est l’auteur ?
2. Quand a-t-il été écrit ?
3. Où a-t-il été écrit ?
4. Pour qui a-t-il été écrit ?

 

1. Qui est l’auteur ?

 

Le récit ne donne pas beaucoup de renseignement sur l’auteur de l’évangile. A la différence de Luc (Lc 1,3), il n’y a pas d’écrit en ‘je’.
Marc est un nom d’origine romaine très répandu. C’est au plus tôt à la fin du second siècle qu’on trouve les premières attestations manuscrites -chez Eusèbe, Irénée, Origène - de l’expression ‘Evangile selon Marc’.


          Eusèbe de Césarée, au début du IVe siècle, rapporte une tradition datant du IIe siècle, que Papias de Hiérapolis aurait reçu « des anciens » (presbyteroi) concernant le deuxième évangile :

« Mais la lumière de la religion brilla d'un tel éclat dans l'esprit des auditeurs de Pierre que ce ne leur fut pas suffisant d'avoir entendu seulement l'exposé oral de cette prédication divine. Ils firent toutes sortes d'instances auprès de Marc, l'auteur de l'Évangile qui nous est parvenu et le compagnon de Pierre, pour qu'il leur laissât un livre qui leur fût un mémorial de l'enseignement donné de vive voix par l'apôtre, et ils ne cessèrent leurs demandes qu'après avoir été exaucés. Ils furent ainsi la cause de la rédaction de l'Évangile selon Marc. Pierre connut, dit-on, le fait par une révélation de l'Esprit et il se réjouit d'un pareil zèle : il autorisa l'usage de ce livre pour la lecture dans les églises. Clément rapporte ceci dans sa sixième Hypotypose et l'évêque d'Hiérapolis, Papias, le confirme de son propre témoignage. »

                                                                           Eusèbe de Césarée, Histoire Ecclésiastique, II, 15

 


Des hypothèses :

 

- celui que les Actes des Apôtres appellent Jean-Marc,
- le fils d’une certaine Marie, chez qui se réunissait la communauté de Jérusalem (Ac 12,12),
- le compagnon de route de Paul et Barnabas, à leur retour d’Antioche (Ac 12,25) mais les quitta à Pergé (13,13), ce qui conduisit Paul à ne plus le reprendre avec lui en mission (15, 36-39),
- celui dont on retrouve son nom dans d'autres écrits du NT (Phil. 24; Col. 4,10, qui précise une parenté entre Marc et Barnabas ; 2 Tm 4,11; 1 P 5,13),

 

>>> Il est donc impossible d'identifier Marc avec certitude.

 

La tradition la plus ancienne remonte à Papias, évêque de Hiérapolis en Phrygie (Colosses, Laodicée) vers 120-130 ; il est ami de Polycarpe, évêque de Smyrne, mort martyr dans la première moitié du second siècle. Papias fait de lui ‘l'interprète de Pierre’. « Marc, qui était l’interprète de Pierre a écrit avec exactitude, mais pourtant sans ordre, tout ce dont il se souvenait de ce qui avait été dit et fait par le Seigneur. » Ces propos sont rapportés par Eusèbe de Césarée.


Mais la théologie de Marc ne reflète pas celle de Pierre telle qu'on peut la connaître aujourd'hui. Dès lors, certains exégètes modernes pensent que Marc est un auteur anonyme judéo-chrétien, c'est-à-dire, un juif converti au christianisme.


En résumé, Marc est, soit un auteur anonyme judéo-chrétien de la deuxième génération, soit ce Jean-Marc de Jérusalem, un juif devenu chrétien qui, à un moment ou à un autre, a quitté la ville sainte.


Ce que nous savons c’est que Marc n’a pas été témoin des événements qu’il rapporte. Il s’est peut-être mis en scène dans l’épisode du jeune homme qui suit Jésus, couvert d’un drap, après son arrestation (14, 51-52), mais on ne parle de lui dans les Actes des Apôtres qu’à partir du chapitre 12. Il a été disciple de Paul (Ac 12, 25 ; 13, 5 et 13) et de Pierre (1 P 5, 13).

 

2. Quand a-t-il été écrit ?

 

  • Certains datent son récit après l'année 70, date à laquelle la ville de Jérusalem fut détruite par les Romains et le Temple incendié par les armées de Titus. Marc, disent-ils, fait allusion à cet événement dans le chapitre 13 de son récit.
  • D'autres objectent que ce n'est pas si sûr : il parle bien de la destruction du Temple (13,2), mais plusieurs prophètes l'avaient déjà annoncée avant lui (Mi, 3,12; Jr. 7,14…) et c'était un lieu commun de la littérature juive du premier siècle.
    Ce ch. 13 reflète une période troublée : climat tendu, profanation du lieu saint, urgence de proclamer l’Evangile aux nations, comparution devant les tribunaux (v11)…
  • Par ailleurs, une tradition ancienne qui remonte à Irénée (vers 150) situe la rédaction de l'Evangile de Marc après la mort de Pierre (64 ou 67).


Difficile de trancher nous sommes devant deux hypothèses.

 

3. Où a-t-il été écrit ?


A la fin du II° siècle, Clément d’Alexandrie cite Rome comme lieu d’origine de l’évangile.

  • En effet, l’oeuvre de Marc n’est pas destinée à des chrétiens issus du judaïsme et vivant en Palestine.
  • L’évangile suppose la mission auprès des nations païennes et Marc s’adresse à des chrétiens issus du paganisme, des pagano-chrétiens ; (en cela il diffère de Mt qui s’adresse à des judéo-chrétiens et des pagano-chrétiens)
  • Rome ! Le fait que Mt et Lc ont rapidement connu le texte de l’évangile, puisqu’ils s’en inspirent, amène à penser que l’évangile provient d’un centre urbain et ecclésial d’un certain rayonnement ; si pas Rome, Alexandrie en Egypte, Antioche en Syrie ??? (Certains exégètes parlent aussi d’une origine syrienne)


Ce qui est de plus en plus unanimement affirmé : l’évangile de Marc a été écrit quelque part dans l’empire romain pour des lecteurs chrétiens d’origine païenne.

 

4. Pour qui a-t-il été écrit ?


Quelques indices d’une écriture qui :

  • Il traduit en grec, certaines formules araméennes : Boanerges 3,17,
    Talitha koum…5,41 Korban 7,11, Ephphatha…7,34 Abba 14,36, Eloi, 15,34
  • Il explique parfois les pratiques ou les mots des juifs pour sa communauté pagano-chrétienne ;
  • Il explique un mot grec par une tournure latine : la pauvre veuve jette au Trésor du temple deux leptes grecs, ce qui est un quadrant romain et il donne ‘le cours du change’ 12,42.
  • Il souligne plus vigoureusement que Mt le fait que toutes les nations sont concernées par l’évangile : 11,17 ‘ma maison sera appelée maison de prière pour toutes les nations’; 13,10 : ‘il faut d’abord que l’Evangile soit proclamé à toutes les nations’. Cela reflète la préoccupation d’annoncer la BN du Xt vivant à tous, pas seulement aux Juifs !

 

Il semble qu’il s’adresse à des personnes enracinées dans la culture latine des chrétiens d’origine païenne.

 

II. LA DYNAMIQUE DE L'ÉVANGILE DE MARC


« Commencement de l’Évangile de Jésus, Christ, fils de Dieu »
(1. 1)


Nous reconnaissons les mots qui ouvrent l’Évangile de Marc. Il s’agit bien ici d’un commencement. Marc ne prétend pas aux derniers mots de son Évangile clore la Bonne Nouvelle de Jésus: nous ici présents, continuons à écrire et à vivre cette Bonne Nouvelle que nous recevons du Christ, dans l’Esprit.

Pour écrire l’Évangile, Marc disposait de documents importants :

  • le récit de la passion
  • des compilations de paraboles, de controverses, de paroles de Jésus
  • des récits indépendants que la tradition des communautés véhiculait…

 

Marc rédige donc son oeuvre à partir de matériaux divers et variés qu’il retravaille, ordonne avec un double objectif :
– communiquer efficacement et clairement
– selon les besoins qu’il a déterminés dans sa communauté, pour nourrir sa foi et sa vie.


L’évangile de Marc est surtout constitué de récits (dont une vingtaine de miracles) et de scènes de controverse entre Jésus et ses adversaires (une dizaine sont rapportées). Par rapport aux autres évangiles synoptiques, il n’a qu’une soixantaine de versets propres (sur un total de six cent soixante). On peut, en particulier, relever quatre petits épisodes qu’il est le seul à rapporter (voir 3, 20-21 ; 4, 26-29 ; 7, 31-37 ; 8, 22-26).


Marc n’a rien d’un écrivain de grand style. Il est parfois incorrect et fait penser à un conteur populaire qui accumule les détails vivants et pittoresques (par exemple le " coussin " de la barque sur lequel Jésus dort, voir 4, 38 ; ou l’herbe verte sur laquelle vont s’asseoir les convives de la multiplication des pains en 6, 39). Par l’utilisation fréquente (quarante-deux fois) de l’adverbe " aussitôt ", il donne un rythme soutenu à son récit.


NB. Le texte de l’Évangile, ne comporte ni titre ni sous-titre : ceux qui figurent dans nos Bibles sont le fait des éditeurs et donc de choix éditoriaux.


Il n’y a pas qu’une seule organisation possible de l’Évangile.
Je peux vous en proposer plusieurs !


1. Un plan selon l’espace
2. Un plan selon ce qui est annoncé par Marc lui-même dans le verset 1.
3. Un plan qui ferait référence aux rapports entre les personnes


Note spéciale. Les finales de l’Évangile de Marc

 

1. Un plan selon l’espace


Marc écrit un récit vivant et concret où l’on retrouve Jésus depuis son baptême par Jean jusqu’à sa passion et sa résurrection. Au cours de son ministère public, Jésus se déplace beaucoup, allant et venant, séjournant ici et là pour arriver à Jérusalem le terme de son voyage.


Des bords du Jourdain, puis la Galilée avec quelques incursions en territoire païen, puis la montée à Jérusalem et la passion et la mort de Jésus à Jérusalem, enfin, une ouverture pascale avec le RV en Galilée et la boucle est bouclée …


Il ne s’agit pas vraiment pour le narrateur de présenter un parcours géographique précis qui renverrait à des référents historiques, mais plutôt de donner des indications topographiques avec un poids symbolique fort : L’image du désert, de la mer, le lac, de la montagne, du chemin, la ville…

Et puis il y a l’image de la maison, ou de la porte qui exprime la visite de Dieu parmi les hommes dans l’intimité.


Ce que nous pouvons noter c’est la première partie de l’évangile se déroule en Galilée.
Et la suite sur la route vers la Judée et à Jérusalem.


Si nous pouvons en déduire une structure elle est simple l’évangile se déroule dans deux régions celle des païens puis Jérusalem la ville du temple, la ville du peuple de Dieu ou Jésus sera arrêté et crucifié.


Plan possible !

 

    Au Bord du Jourdain (1,1-13)

 

A. Ministère en Galilée (1,14-9,50)
    Capharnaüm
    Hors de capharnaüm
    Les rives du lac
    Nazareth et les villages à la ronde
    Les deux rives du lac
    Les territoires juifs et païens
    Traversée de la Galilée et capharnaüm

 

B. Montée à Jérusalem (10,1-52)

 

C. A Jérusalem (11,1-16,8)
    Ministère et passion de Jésus
    Annonce du regroupement en Galilée (16,7-8).

 

2. Un plan selon ce qui est annoncé par Marc lui-même au verset 1 !


Comme vous le savez un bon exposé commence par un plan exact et explicite !
Je ne crois pas que Marc ait écrit sans ordre comme l’écrivait Papias, mais que plutôt, par l’écriture de l’Évangile, il met tout en oeuvre pour guider sa communauté, le plus simple étant de placer des balises très claires dès le premier verset :

‘Commencement de l’évangile de Jésus Christ, Fils de Dieu.’


1- Jésus
2- Christ
3- Fils de Dieu.


1- Jésus


Le nom Jésus est dérivé du nom hébreu Yeshua qui est lui-même une forme abrégée du nom du grand héros biblique Josué, le successeur de Moïse qui fit entrer le peuple d’Israël dans la terre promise. Josué était la forme ordinaire du nom utilisé avant l’exil à Babylone.


Après l’exil, c’est Jésus qui devient la forme usuelle du nom chez les juifs. Ce prénom est très populaire chez les juifs jusqu’au début du IIe siècle de notre ère.

C’est certainement parce que le nom de Jésus et révéraient chez les chrétiens que les juifs cessèrent alors de l’utiliser.


Jésus fait partie d’une famille dont les noms renvoient aux patriarches du peuple juif (Joseph l’un des 12 fils de Jacob, Marie soeur de Moïse. Ses 4 frères Jacques (Jacob), José (Joseph), Simon (Siméon) et Jude (Judas) portent aussi les noms des patriarches qui engendrèrent les 12 fils/ tribus d’Israël. C’est certainement le signe que toute la famille de Jésus participe à ce réveil de l’identité nationale et religieuse juive, identité qui se définit dans un rapport fort avec le passé des patriarches et contre la forte influence païenne.

Jésus -vrai homme- reçoit un nom d’homme qui a une histoire et qui est annoncé et baptisé par un autre homme Jean-Baptiste (1,2 – 11)


Mais qui est-il en vérité ?
Toute la première partie de l’Évangile va nous amener à nous interroger sur l’identité de cet homme, jusque la Confession de Pierre à Césarée (8,27 – 30).


Qui est cet homme d’autorité qui guérit, exorcise, purifie, donne un enseignement nouveau et qui suscite une telle opposition que pharisiens et hérodiens veulent le faire périr très vite (3,6) ?

On va le voir enseigner aux foules, enseigner les siens, faire taire les démons qui le reconnaissent comme « le Saint de Dieu » et se heurter à une incompréhension tenace.

Non seulement, Jésus doit affronter l’opposition des pharisiens, mais il fait face aussi à l’inintelligence persistante des disciples qui ne comprennent ni le sens de ces paroles ni le sens des miracles et qui finalement ignorent qui est vraiment Jésus.

Seule une intervention de Dieu permet aux disciples de voir clair. C’est la portée du récit de la guérison de l’aveugle de Bethsaïde (8,22 – 26) qui clôt cette section et prépare l’épisode suivant où Pierre pourra déclarer : « Tu es le Christ ».


2- Christ


La seconde partie de l’Évangile va nous accompagner sur le chemin d’une révélation, celle du Messie, autre mot pour dire Christ.

C’est le titre qui lui sera donné par Pierre au nom des disciples lors de la Confession de Césarée (8,29) et que Jésus se reconnaîtra à lui-même devant le Sanhédrin (14,61).

La Confession de Césarée est le tournant décisif.

Le jugement par le Sanhédrin produit la fin.

Ce titre de Christ annonce donc les grandes articulations du récit et l’enjeu capital.

 

3- Fils de Dieu


L’expression se trouve dans les cris des démoniaques semeurs de confusion (3,11 et 5,7), et puis tout à la fin de la Passion, sur les lèvres d’un homme qui n’est pas juif, le centurion romain : « Vraiment, cet homme était Fils de Dieu. » (15,39)

Dans la logique de l’Évangile de Marc, cette déclaration du centurion est la seule qui soit acceptée. Les 2 autres, tout à fait précoces dans le récit, sont censurées: « silence ! » (1,25 et 3,12).


Un autre élément peut confirmer ce plan :


Nous trouvons dans cet évangile comme un dialogue entre le ciel et la terre :

« Tu es mon Fils bien-aimé. » dans le prologue et

« Celui-ci est mon Fils bien-aimé. Écoutez-le ! » à la Transfiguration (9,7).

De ce titre annoncé au tout début, puis refusé à cause de la confusion démoniaque, jusqu’à ce titre accepté – une fois Jésus mort (15,39), nous avons comme un dialogue…

  • entre la voix venue du ciel au baptême et à la transfiguration
  • et la voix humaine qui pose d’abord une question en la personne du grand prêtre : « es-tu le Fils du béni ? » (14,61)

et qui conclut, en la personne d’un païen, le centurion : « Vraiment celui-ci est Fils de Dieu » (15,39).


Plan possible !

 

    La voix du ciel appelle Jésus ‘mon fils bien aimé’ (1,1-13)


A. Qui est Jésus ? (1,14-8,26)


B. Jésus se révèle. (8,27-16,8)

    Profession de foi de Pierre ‘tu es le Christ’
    La voix céleste ‘celui-ci est mon fils bien aimé’ (9,7)
    Jésus : ‘le fils de l’homme doit être rejeté’
    Jésus se déclare devant le Sanhédrin ‘le Christ, Fils de Dieu’ (14,62)
    Le centurion déclare ‘cet homme était le fils de Dieu’(15,39)


    Désarroi des femmes devant le tombeau vide (16,7-8)

 

3. Un plan qui ferait référence aux rapports entre les personnes


Brièvement pour l’évoquer puisque j’en ai trouvé des traces dans le cahier évangile consacré à l’Evangile selon st Marc.


C’est une lecture qui s’appuie sur l’évolution des relations entre les personnes et groupes de personnes et permet de repérer une structure en 6 étapes.


Plan possible !


Jésus et Jean Baptiste (1,1-13)


A. Jésus et ses disciples, la foule, les adversaires (1,14-6,6)
    1ère étape : mise en place du triangle des personnages
    Jésus et les disciples face à la foule et aux adversaires
    2ème étape : Rupture avec les adversaires.
    Les disciples sont pris à part de la foule
    La foule et les adversaires sont distingués


B. Faille entre Jésus et ses disciples (6,6-10,52)

    3ème étape : Jésus face à l’incompréhension de ses disciples
    sur sa mission et la leur

    4ème étape : Jésus face à l’incompréhension de ses disciples
    sur son chemin et le leur


C. Jésus et ses disciples face aux adversaires à Jérusalem (11,1-15-41)
    5ème étape : L’affrontement à Jérusalem

    6ème étape : Jésus prépare ses disciples au drame qui arrive
    Jésus seul face à ses bourreaux


Les femmes et le tombeau de Jésus (15,42-16,8)


Il nous reste un détail à régler … enfin un détail !!!

 

La finale de l’Évangile de Marc : Mc 16,9 – 20


Vous avez noté que ces trois propositions de plan arrêtent le récit au verset 16,8. Tandis que l’Évangile de Marc tel que nous le connaissons s’achève au verset 20.

Nous connaissons les versets décrivant les apparitions du ressuscité (vv. 9 – 20).

Or, ces versets ont été ajoutés par un copiste postérieur.

Cette finale de Marc est tenue pour CANONIQUE, c’est-à-dire qu’elle fait partie des écritures que l’Église reconnaît comme inspirées

mais elle est INAUTHENTIQUE au sens où elle n’est pas de la même main que le reste de l’Évangile.


Plusieurs arguments permettent de l’affirmer.

 

  • Des manuscrits importants (le Vaticanus et le Sinaïticus) qui ne possèdent pas les versets 9 à 20.
  • Des auteurs anciens comme Eusèbe de Césarée savent que cette finale ne se lit pas dans tous les manuscrits grecs. Et il existe dans ces manuscrits plusieurs variantes de la finale qui ne sont pas de la main de Marc.
  • Certains manuscrits offrent une finale courte : « Elles racontèrent brièvement aux compagnons de Pierre ce qui leur avait été annoncé. Ensuite Jésus lui-même fit porter par eux, de l’orient jusqu’au couchant, le message sacré et incorruptible de salut éternel ». Dans d’autres manuscrits encore, cette finale courte a été ajoutée à la finale longue que nous connaissons.
  • Les versets 9 à 20 se distinguent du reste de l’Évangile de Marc par leur style et leur vocabulaire, mais s’apparentent aux apparitions du Ressuscité que l’on trouve dans les trois autres Évangiles : l’apparition du Ressuscité à Marie de Magdala//Jean 20, 1, aux disciples d’Emmaüs//Luc 24,13 – 35, aux Onze//Mathieu 28,16 – 20, Luc 24,36. On retrouve aussi l’ascension évoquée dans les Actes 1,9 – 11.


«16 1 Lorsque le sabbat fut passé, Marie la Magdaléenne, Marie, mère de Jacques, et Salomé achetèrent des aromates afin d'aller l'embaumer. 2 Et, le premier jour de la semaine, de grand matin, elles vinrent au sépulcre, le soleil venant de se lever. 3 Elles se disaient entre elles : " Qui nous roulera la pierre de l'entrée du sépulcre? " 4 Elles regardèrent et observèrent que la pierre avait été roulée de côté; or elle était fort grande. 5 Entrant dans le sépulcre, elles virent un jeune homme assis à droite, vêtu d'une robe blanche, et elles furent saisies de frayeur. 6 Mais il leur dit : " N'ayez pas de frayeur ! Vous cherchez Jésus de Nazareth, le crucifié : il est ressuscité, il n'est pont ici. Voici la place où on l'avait déposé. 7Mais allez dire à ses disciples et à Pierre qu'il vous précède en Galilée; c'est là que vous le verrez, comme il vous l'a dit. " 8 Sortant du sépulcre, elles s'enfuirent, car le tremblement et la stupeur les avaient saisies; et elles ne dirent rien à personne, parce qu'elles avaient peur.


Pourquoi cet ajout ?

 

L’Évangile dont la finale est : « Et elles ne dirent rien à personne, car elles avaient peur… » 16,8, qui s’achève donc simplement sur le signe du tombeau vide, la douleur et la peur des témoins de cette absence, est très difficilement recevable…

C’est pourquoi, depuis la plus haute antiquité, on a donné à l’Évangile de Marc une fin moins rude.

 

 

POUR CONCLURE !


Le cardinal Martini disait que Marc est " l’évangile des catéchumènes ".

- Ceux-ci doivent apprendre à mieux découvrir le mystère de la personne de Jésus : il est le Christ, le Fils de Dieu.

- Mais il ne leur suffit pas de connaître les titres qui s’appliquent à Jésus.

- A travers la vie de Jésus et l’expérience des apôtres, c’est également à un renouvellement intérieur qu’ils sont appelés pour devenir vraiment disciples de Jésus.

- Comme les Douze, ils doivent découvrir que Jésus ne vient pas assurer une réussite terrestre.

- Ils auront à suivre le chemin du crucifié pour pouvoir ressusciter avec lui. On ne peut parcourir ce chemin qu’en acceptant la manière de faire de Dieu (8, 33).

 

 

 

(1) C. Focant. Professeur émérite d'exégèse du Nouveau Testament ... L'évangile selon Marc (Commentaire biblique: Nouveau Testament, 2), Paris, Cerf, 2004,p 1 ..

Article publié par MICHEL LAISNE • Publié le Vendredi 29 janvier 2016 • 983 visites

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