Messe du Christ Roi

Homélie du père Justin Magloire NABOUD

Dimanche 22 Novembre, Fête du Christ Roi de l’Univers


La fête de la solennité du Christ Roi de l'univers est une grande fête pour nous catholiques. Elle fut instituée par le pape Pie XI, en 1925, afin de mettre en lumière l'idée que les nations du monde restent fidèles aux lois du Christ. L’Evangile nous rappelle le retour de Jésus, le roi de l’univers. « Lorsque le Fils de l'homme viendra dans sa gloire, avec tous les anges » (Mt 25,31) Il y a un jugement, mais il s’agit d’un jugement d’amour. L'amour aura le dernier mot.

Jésus nous montre que le sens de la royauté -ou de la puissance- est de se mettre au service des autres. Il a confirmé qu'il était Maître et Seigneur (Jn 13,13), et qu'il était Roi (Jn 18,37), mais il a exercé sa fonction de Maître en lavant les pieds de ses disciples (Jn 13,4 ss), et il a régné en donnant sa vie. Jésus-Christ règne d'abord à partir d'une mangeoire et ensuite à partir d'un trône pas très confortable, c'est à dire, la Croix, expression de l’amour de Dieu pour les hommes.

La scène du jugement dernier dans l’évangile de st Matthieu nous révèle la manière dont seront jugés ceux qui n’ont pas la Loi d’Israël. Les juifs seront jugés par rapport à la Loi puisqu’ils l’ont reçue pour en vivre. Mais comment seront jugées ceux qui n’ont pas la Loi ou ceux qui n’ont pas accueilli le message du Christ ? La perspective est celle du salut des non-chrétiens et des non-croyants. A quoi va-t-on reconnaître l’intention de leur cœur et la réalité de leur vie ?

Si le critère était la foi, sur quelle foi les hommes seraient jugés ?

Supposons un instant que le critère du dernier jugement soit la foi chrétienne, 1/3 d’hommes et femmes de notre planète répondraient à ce critère. Où seront nos frères juifs, musulmans, bouddhistes, indouistes et des religions traditionnelles d’Afrique et d’Amérique ? C’est sans oublier que certains chrétiens de mon pays et d’ailleurs ne comprennent pas ce que nous appelons Trinité ou le salut par les sacrements. Jésus ne place pas l'appartenance religieuse au premier rang des critères de jugement. Le salut est indépendant de l'appartenance à l'Église. La surprise est le signe qu'il y a une abolition des frontières religieuses.

Si le critère était la richesse, à peine 1/100e de l’humanité répondrait à ce critère. Et que seront les autres ?

Si le critère était une bonne moralité, qui peut affirmer qu’il est parfait ?

Si le jugement du Christ devait se fonder sur ces critères, peu serait sauvé, la mission rédemptrice aurait échouée. Jésus qui est Dieu, nous propose un critère universel que st Jean de la Croix exprime merveilleusement en ces termes : « Au soir de votre vie, vous serez examiné sur l'amour. Apprenez donc à aimer Dieu, comme il veut l'être... ».

Ainsi, le poids de notre vie correspondra à la manière dont nous avons servi les autres et particulièrement les plus petits. Ce que nous avons fait aux plus petits des hommes sera retenu à notre crédit et ce que nous avons refusé aux plus petits sera mis à notre débit. Cet évangile va plus loin et nous fait découvrir que le service de nos semblables atteint en fait la personne de Dieu lui-même. Tout geste, toute action et toute démarche pour venir en aide à notre prochain nous met objectivement en relation avec Dieu, même si nous n’en n’avons aucun désir et aucune conscience.

Le Christ s’adresse en effet à des gens qui semblent ne pas le connaître. Le fait est que tous se demandent : « Mais Seigneur, quand t’avons-nous vu ? Quand sommes-nous venus te visiter ? Quand t’avons-nous donné à manger, à boire ? Quand t’avons-nous vêtu ? » (Mt 25, 37). Aujourd’hui, on ajouterait : « Quand t’avons-nous téléphoné, envoyé un chèque, un don en ligne ? »  Et le roi leur répond : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont les miens, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40). Ainsi le jugement de Dieu sur nos vies est le dévoilement d’une réalité qui restait cachée même à nos propres yeux.

Le Concile Vatican II, dans Gaudium et spes, en expliquant les exigences de la charité chrétienne, nous disait : « De nos jours surtout, nous avons l'impérieux devoir de nous faire le prochain de n'importe quel homme et, s'il se présente à nous, de le servir activement: qu'il s'agisse de ce vieillard abandonné de tous, ou de ce travailleur étranger, méprisé sans raison, ou de cet exilé, ..., ou de cet affamé qui interpelle notre conscience en nous rappelant la parole du Seigneur: ‘Chaque fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait’ (Mt 25,40)». Le Christ vit à l'intérieur de chaque humain.

Ce n’est pas une manière de dire que tout acte de solidarité est de nature chrétienne. Mais ce qui se réalise de bien et de bon par les hommes, ce qu’ils mettent en œuvre de grand ou de modeste pour le soin des plus fragiles ou pour venir en aide à leurs semblables, tout cela a quelque chose à voir avec Dieu et avec la foi. Cela reste voilé aux yeux des hommes et ne m’empêche pas de croire ce qu’eux-mêmes ne voient pas, et ne m’interdit pas de rendre grâce à Dieu pour cet immense capital d’amour et de service que la générosité humaine offre.

Il y a une fraternité de Jésus avec les plus pauvres et les plus démunis. Ils sont frères de Jésus et donc seront sauvés à cause de cette pauvreté. Jésus s'est identifié aux pauvres. Ceux qui font attention à eux sont les « chrétiens sans le savoir » ou « les chrétiens anonymes » selon l’expression de K. Rahner.

Le critère de jugement sera une valeur universelle, l’amour : donner à manger, donner à boire, habiller quelqu'un, visité un malade, un prisonnier, une personne seule, deviennent tous des actes d'amour pour non seulement pour un chrétien, mais pour tout homme. Ceux sont les œuvres de miséricorde. Ne pas faire quelque chose qu'on doit faire, en nous mettant au service de nos frères et sœur, revient à laisser le Christ sans ces attentions d'amour.

Dans sa dernière lettre encyclique, Tous frères, le pape François nous appelle à un grand mouvement de fraternité universelle alors que la crise de la Covid-19 risque plus que jamais de laisser pour compte des pans entiers de la population mondiale déjà meurtrie par une mondialisation inégalitaire. « Prenons soins, dit-il de la fragilité de chaque homme, de chaque femme, de chaque enfant et de chaque personne âgée, par une attitude solidaire et attentive, l’attitude de proximité du bon samaritain. »

Bonne fête du Christ Roi de l’univers et que son amour règne en nos cœurs.

 

Messe en replay (YouTube) :

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Article publié par Michel LAISNE • Publié le Lundi 23 novembre 2020 • 944 visites

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