Homélies
du Père Bernard Descarpentries

Fête de la Toussaint et messe des défunts

 

Homélie de la Fête de la Toussaint

 

Qu'elle est cette foule innombrable de personnes, que nous fêtons aujourd'hui ?

 

L'Apocalypse dit : “Ils viennent de la grande épreuve”, et l’Agneau les a sauvés par son sang répandu sur la croix. C'est la foule des témoins, inscrits ou non au calendrier. De nos jours encore, ce sont ceux qui sans être martyrisés, passent par la croix, dans le mystère ténébreux du mal à l’œuvre, dans la nuit et l’ombre de la mort. C’est donc fête aujourd’hui, pour ceux qui offrent ou ont tenté d'offrir la vie de DIEU. Ceux-là aussi, c'est vrai parfois, à qui on a tout pris (la vie, le nom, l’honneur), mais que Dieu, par le mystère de l’Agneau appelle ses enfants. Ils sont du même sang que l’Agneau transpercé. Nous les découvrons avec l'agneau sur l'autel de son amour partagé. Nous les connaissons dans notre quotidien qui sans chercher d'honneurs, font vivre les mouvements et associations, les services d’église ou de la société civile. Au delà de l'humanisme et sans claironner comme le dit Jésus en Matthieu 25, ils apportent le Christ en déployant sa Charité. (Exemples vus dans la semaine)

 

Le monde de l’orgueil, de l’argent, de la haine raciale, de la violence et du pouvoir, sont incapables de reconnaître leur mystère. Ils les insultent, ceux qui ont tout souillé : la vie et ses racines, la bonté et l’honneur, la vérité de l’homme et de Dieu. Mais aujourd’hui, nous célébrons la justice de Dieu qui tient en quelques mots : Heureux les pauvres ! Heureux les pacifiques ! Heureux les affligés ! Heureux les persécutés ! La seule victoire qui tienne bon est celle de l’amour. Victoire des enfants de Dieu, face à l’acharnement du mal.

 

Quelque soit leur histoire et leur labeur, par leurs situations et leurs conditions de vie, ils ont basé leur vie sur ce qui est un défi aux valeurs du monde. Pour eux, dans l’amour du Christ, la pauvreté devient richesse et les larmes, joie ; la douceur l'emporte sur la violence, la paix sur la guerre, et la miséricorde vaut plus que la vengeance. Pour eux, la mort n’est plus que le seuil de la présence totale dans l'Amour. Face à un monde dur et sans pitié, l'Amour fraie un passage qui débouche sur la Résurrection, le relèvement de toute dignité.

 

Bonne fête à la foule innombrable de tous ceux qui s’obstinent à penser que le sang arabe ou européen, juif ou asiatique, africain ou amérindien, sera toujours un même sang qui a jailli du cœur du Christ ; comme une source vive pour tous les hommes. Un jour viendra où tous seront semblables à lui, transfigurés par son regard, parce mus de son Esprit. Déjà, ennemis jurés, frères divisés, étrangers ou fils et filles de la maison, enfants nés d’une même grâce...  prions les saints de nous aider à déployer la sainteté de DIEU. Qu'Il nous confère une même joie de total épanouissement, dans le partage de vie avec nos frères. Ne nous laissons pas gagner par la mort maintenant, pour être des vivants éternellement !

 

 

Homélie de la messe des défunts

 

Une fois par année, nous nous souvenons de ceux et celles qui nous ont quittés. Nous nous souvenons de nos parents et amis partis au cours de l’année, mais nous portons aussi dans notre souvenir toutes les personnes qui nous sont chères et qui nous ont laissés depuis longtemps parfois. Tous ceux qui se sont dévoués dans les paroisses, dans l’éducation et dans la pastorale. À chacun d’entre nous de mettre les noms des personnes qu’il porte aujourd’hui dans sa mémoire...


Cette commémoration, c’est aussi un mémorial.

 

Qu’est-ce à dire ? La mémoire ne fait pas que nous rapporter au passé ; elle rend aussi présents ceux qui le peuplent. Les personnes défuntes persistent, ne vivent pas seulement par ce lien de souvenir que nous en gardons, liens de la culture, ou par ce que nous apportons sur les tombes (fleurs et lumières de toutes sortes). A la Toussaint, qu'il vente ou qu'il pleuve, jusque tard dans la soirée les abords des cimetières grouillent de visiteurs et de marchands, et deviennent des ilots d'incandescence où la présence se fait sentir non seulement physiquement mais aussi spirituellement. Associer la lumière aux défunts pour manifester le lien qui nous unit à eux me paraît une très belle façon de montrer qu’ils sont toujours avec nous, mais d’une façon mystérieuse ; parce que la lumière qui guide et éclaire, peut soutenir et illuminer notre chemin par leurs exemples et par leur vie. Comme la lumière qui dissipe les ténèbres, ils nous montrent que le passage par la mort n’est pas la fin de tout. Comme la lumière qui au lever du jour fait apparaître tout dans sa beauté et sa nouveauté, ainsi ils témoignent de la beauté des « cieux nouveaux et de la terre nouvelle » où ils sont rendus avec le Ressuscité toujours vivant auprès de Dieu. Voilà ce que ces gestes de la tradition peuvent nous inspirer pour approfondir le lien avec nos défunts. Mais n'en restons pas aux gestes de souvenir.

 

La commémoration de tous les fidèles défunts, qui centre notre attention sur les personnes qui nous ont quitté, met en évidence le lien qui nous unit à elles. Bien plus encore, elle nous rappelle le lien qui les unit à Dieu.


Les défunts que nous portons dans notre mémorial, se sont rendus dans la maison de Dieu. Ils y ont trouvé leur place. Les promesses de Jésus sont réalisées : « Dans la maison de mon Père , beaucoup peuvent trouver leur demeure  »…  « Là où je suis, vous y serez vous aussi » (Jn 14, 2-3). Ils sont là où ils doivent être ; dans l'’amour de Dieu, qui les a portés de toute éternité, qui les a mis au monde, qui les a accompagnés au fil de leur vie à travers des hauts et des bas, des questionnements, des réussites et des erreurs, au travers de tous les liens de vie posés et entretenus. L'Amour de Dieu les a mené à la plénitude. Ils ne sont plus à eux-mêmes, mais « à Dieu » comme le dit saint Paul du Christ après la résurrection : « car en mourant, c’est au péché qu’il est mort une fois pour toutes : vivant, c’est pour Dieu qu’il vit » (Rm 6, 10). De même les fidèles défunts « vivent pour Dieu » totalement et définitivement. Leur lien à Dieu n’est plus un chemin qu’ils empruntent ou une ascension à travers les nuages, c’est la pleine lumière dans le repas éternel où il n’y a plus de larmes, ni de pleurs. Avec Job, ils peuvent dire : « Je sais que mon libérateur est vivant » (Job 19, 25). La commémoration des fidèles défunts est pour les chrétiens l'occasion d'affirmer et de vivre et faire vivre dans l'espérance réalisée de vie éternelle, donnée par la résurrection du Christ. Se souvenir de nos défunts, en faire la commémoration, nous permet d’entrer dans cette vie éternelle qui est déjà commencée et de proclamer avec conviction cet article de notre profession de foi : « Je crois à la vie éternelle ».

 

Article publié par MICHEL LAISNE • Publié le Lundi 04 novembre 2013 • 1727 visites

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