5. Un renversement de perspectives

Par Guillemette - Famille Chrétienne, 30/04/2011

De Jean-Paul II, « tous, nous avons reçu grâce après grâce », pourrions-nous dire aujourd’hui avec saint Jean (1-16). Les témoignages que vous nous avez envoyés le confirment ; nous en publions une série de cinq. Depuis ses fiançailles en 1978 jusqu'au décès de son père, lors des JMJ de 1997, Guillemette mesure l'étendue des fruits spirituels du pontificat de Jean-Paul II pour sa famille.

« "N’ayez pas peur !" Nous venions de nous fiancer lorsque ce cri a retenti en octobre 1978. Un grand idéal nous habitait : nous aimer – toujours – et fonder une famille qui rayonnerait de la foi dans laquelle nous avions grandi. Notre éducation avait fait de nous des chrétiens « motivés », certes, mais terriblement marqués par cet ostracisme qui frappait aux frontières de l’Eglise.

Sa première venue à Paris en juin 1980 survenait un petit mois avant la naissance de notre premier enfant. Nous sommes allés à sa rencontre au Bourget. Il nous y invitait à un retour à nos sources spirituelles : "France, souviens-toi des promesses de ton baptême !" Une interpellation forte souvent reprise en écho.

Je me rappelle aussi à titre anecdotique que nous avions « piqué un sprint » sur le terrain du Bourget afin de nous approcher des barrières et le voir de plus près. Dans la course, alourdie par la très prochaine maternité, je me suis étalée de tout mon long ! Je me souviens avoir un peu rêvé pendant la messe qui suivait pouvoir accoucher sur place dans les grandes tentes de la Croix rouge dressées auprès de l’esplanade, me disant intérieurement : "Si le bébé vient à naître là, il viendra sûrement le bénir." Ce ne fut pas le cas…
 
Un renversement total de perspectives

Le même jour nous sommes allés au Parc des Princes communier à ce grand moment de rencontre avec la jeunesse catholique de France. Jean-Paul II nous y invitait à l’amour vrai en méditant sur le jeune homme riche. « La permissivité morale ne rend pas les hommes heureux, la société de consommation ne rend pas les hommes heureux ». Invitation au bonheur, à l’exigence « heureuse » et ses propos là aussi ont eu une résonance très profonde, autant qu’ils soulevaient l’enthousiasme immédiat.

Enfin nous avons pu suivre à la télévision le reste de ses interventions : Saint-Denis et son discours social notamment. Ce fut pour nous un renversement total de perspectives : nous passions du « Non » au « Oui ». Les valeurs humaines défendues – sociales ou morales – étaient sans doute les mêmes. Mais la façon de les exprimer et de les vivre était totalement bousculée. Nous sortions en France du deuxième vote en faveur de l’avortement. Un combat mené avec détermination pour notre part. Jean-Paul II en changeait la couleur en nous invitant au respect et à l’amour de la Vie, de toute vie… un amour puisé directement à la source du Christ. Ce n’était plus un simple combat humain et idéologique mais une exhortation profonde au respect de toute personne, sans anathème et sans jugement.

Notre foi trouvait un étayage et une ouverture inespérée 

Tout au long de son pontificat, ce pape n’a eu de cesse que de nous inviter à un dépassement évangélique toujours plus vrai. Voyageur infatigable, défenseur inlassable des droits de l’homme, il a su réconcilier en nous les aspirations humaines les plus fortes avec l’appel de notre foi. Nous n’étions plus des « schizophrènes » égarés dans le monde : notre foi trouvait, auprès de lui, un étayage et une ouverture que nous n’espérions pas.

Nos enfants ont grandi, sous sa bienveillante paternité, dans une église qui vivait son printemps. Avec eux nous avons cueilli par brassées les germinations de son verbe qui se répandait urbi et orbi.

Beaucoup plus tard en 1997, il est revenu à Paris rejoindre les centaines de milliers de jeunes à qui il avait donné rendez-vous pour les JMJ. Mon père était alors très malade mais avait quand même retenu sa place à Longchamp. Il nous disait que le pape était plus âgé et plus malade que lui et donc qu’il pouvait bien lui-même faire un effort. Son parcours terrestre s’est en fait achevé le vendredi 22 août, à l’avant-veille de cette grand-messe qui a rassemblé un million de personnes… Le pontificat avait commencé un 16 octobre, date d’anniversaire de mon père. Ces deux hommes sont restés étroitement associés dans leur paternité charnelle et spirituelle. Et c’est dans la ferveur de la veillée de ces JMJ parisiennes, auprès de Jean-Paul II, que j’ai vécu mes premières heures "orpheline". Je ne l’oublierai jamais. » 

 
Guillemette

Article publié par MICHEL LAISNE • Publié le Mardi 26 juillet 2011 - 16h54 • 1241 visites

keyboard_arrow_up