Conférence du Père A. MERVILLE

Découvrir le 5ème mystère lumineux du Rosaire

 

Le Père Bernard DESCARPENTRIES l'a bien montré ce matin, en nous retraçant l'histoire du Rosaire : si l'Église n'a cessé d'encourager la dévotion mariale, c'est dans la mesure où elle conduisait à la foi au Christ. Le 7 octobre 2002, le bienheureux pape Jean-Paul II apporte un dernier joyau à la couronne; vous le savez tous, rosaire, rosarium en latin, c'est la couronne de roses de la vierge ; il intégre à cette couronne de roses 5 mystères lumineux ; il s'en explique en écrivant ceci : « le parcours spirituel du Rosaire est fondé sur la contemplation incessante du visage du Christ... Avec le Rosaire, le peuple chrétien se met à l'école de Marie, pour se laisser introduire dans la contemplation de la beauté du visage du Christ et dans l'expérience de la profondeur de son amour » (Lettre apostolique Rosarium Virginis Mariae n°15).
Sommes-nous assez convaincus que l'un des plus beaux cadeaux que puisse nous faire la vierge Marie, c'est de nous aider à fixer notre regard sur son fils Jésus, nous aider à scruter chacun des événements de sa vie, pour confesser avec elle, avec toute l'Église, en chacun de ces événements qu'Il est notre Christ et Seigneur ?

Voulez-vous que nous nous fisions les yeux, cet après-midi sur le 5ème mystère lumineux, le mystère de l'Eucharistie ? Nous allons demander à la vierge Marie de nous aider à découvrir ce qu'il a dans le cœur au moment où il institue ce sacrement, afin de le découvrir avec les yeux de la foi et afin d'en recueillir les fruits dans notre vie quotidienne.

Il convient tout d'abord de ne jamais oublier que le Rosaire est un chemin de méditation ; un chemin, c'est fait pour nous conduire quelque part. Si vous avez eu un peu de temps pour parcourir le chemin spirituel que les fleuristes de Douai ont créé à votre intention en collaboration avec notre atelier d'icônes constitué d'adultes et d'enfants, tout au long du déambulatoire de la Collégiale, j'espère que vous avez pris le chemin par le bon sens ! En effet : les 10 premiers mystères du Rosaire commencent à l'annonciation – l'entrée est ici, du côté gauche – puis nous conduisent, si l'on respecte bien les étapes de ce chemin de méditation, jusqu'au mystère de l'Eucharistie – ici, sur votre côté droit – . En suivant ce chemin, vous avez compris que l'on ne peut découvrir la plénitude de ce 10ème mystère du Rosaire sans avoir auparavant accueilli chacune des 9 étapes, joyeuses et lumineuses, qui nous préparent à accueillir ce mystère eucharistique comme sommet et source, « sommet auquel tend toute l'action de l'Église, source d'où découlent toute sa vertu » (Constitution sur la Liturgie n°10, concile Vatican II).
Ce mystère central du Rosaire ne cesse d'être médité par l'Église, avec la vierge Marie, afin qu'elle nous en révèle toute la beauté et toute la profondeur. Il y a toutefois un paradoxe; à la différence des autres mystères de la vie du Christ, une chose est sûre: la vierge Marie ne faisait pas partie du nombre des disciples qui ont été conviés par le Christ à l'institution de l'Eucharistie. On pourrait donc objecte r: puisqu'elle n'était ni invitée ni présente au moment où le Christ institue le mémorial eucharistique, que peut-elle nous révéler de plus que ce qui nous a été transmis par les apôtres qui l'ont vécu et reçu de la bouche du Maître ?
Cette question est légitime; nos frères réformés ne cesse de nous la poser ; voici comment Jean-Paul II l'aborde :  « Mettons-nous surtout à l'écoute de la très sainte Vierge Marie en qui, plus qu'en quiconque, le Mystère de l'Eucharistie resplendit comme mystère lumineux. En nous tournant vers elle, nous connaissons la force transformante de l'Eucharistie » (encyclique de Jean-Paul II, 16 avril 2003 l'Église vit de l'Eucharistie n°62)

Il n'y a pas de doute que la réforme liturgique du Concile a produit de grands bénéfices de participation plus consciente, plus active et plus fructueuse des fidèles au saint Sacrifice de l'autel. Par ailleurs, dans beaucoup d'endroits, l'adoration du Saint-Sacrement a une large place chaque jour et devient source inépuisable de sainteté (l'Église vit de l'Eucharistie, encyclique de Jean-Paul II, 16 avril 2003)

« Quand l'Église célèbre l'Eucharistie, mémorial de la mort et de la résurrection de son Seigneur, cet événement central du salut est rendu réellement présent et ainsi "s'opère l'œuvre de notre rédemption". Ce sacrifice est tellement décisif pour le salut du genre humain que Jésus Christ ne l'a accompli et n'est retourné vers le Père qu'après nous avoir laissé le moyen d'y participer comme si nous y avions été présents » (n°11)
Cela signifie que l'Eucharistie ne peut se réduire à la brièveté de ce qui s'est passé le dernier soir de la vie du Christ. C'est là tout le sens de ce mémorial institué par Jésus: la vierge Marie ne participe pas à l'Eucharistie à la manière des apôtres chargés de transmettre le mémorial, mais à la manière des croyants de tous temps, appelés à vivre ce mémorial comme un éternel présent. Bien naturellement, la toute première à participer à l'Eucharistie comme si elle y avait été présente c'est la vierge Marie.
Lorsque les apôtres ont reçu le mémorial eucharistique, le soir de la cène, les évangistes qui ont rapporté cet événements disent chacun à leur manière que les apôtres n'ont pas pris conscience, à ce moment-là, de la profondeur du mystère qui s'est réalisé sous leurs yeux. Ceux-ci restaient en quelque sorte voilés. Il faudra attendre le jour de la résurrection pour que leurs yeux s'ouvrent et que leur cœur s'ouvrent au mystère de la foi.
Il n'en est pas de même pour la vierge Marie. St Luc nous la révèle comme celle qui, à la différence des apôtres, ont été lents à croire tout ce qu'ont annoncé les prophètes, est bienheureuse et bénie parce que dès le commencement, elle avait ouvert ses yeux et son cœur à la présence eucharistique de Jésus! Jésus proclamera un jour sur la montagne cette parole : heureux les cœurs purs, ils verront Dieu. C'est parce qu'elle a su voir Dieu avec les yeux de la foi que l'Église a compris que le cœur de Marie était resté pur et immaculé dès l'origine et jusqu'au terme de son pèlerinage terrestre.
C'est pourquoi, il nous suffira de parcourir les 10 premiers mystères du Rosaire pour découvrir de quelle manière, à chaque nouvelle révélation du mystère du Christ, Marie vit par avance un aspect du mystère de l'Eucharistie par lequel le Christ nous est rendu présent et se donne à nous.

Ce qui m'a permis de le comprendre, c'est le miracle eucharistique qui a eu lieu le 14 avril 1254, ici-même à Douai. Lorsque tout-à-l'heure, cette hostie sera amenée en procession pour un temps d'adoration, vous vous souviendrez que c'est en regardant cette hostie conservée intacte depuis 758 ans que les chrétiens ont vu le Christ leur apparaître, aux uns sous la forme d'un enfant, à d'autres sous les traits de sa passion, à d'autres encore, avec un visage glorieux. Ce miracle, c'est le point focal du mystère eucharistique : le mystère du Christ est tout entier présent au moment où il a pris chair, quand il a souffert et qu'il est mort, que lorsqu'il est ressuscité avec un corps glorieux. C'est ce que nous allons montrer en contemplant sous ce prisme les 9 premiers mystères du Rosaire.

1. Comment le mystère joyeux de l'Annonciation
préfigure-t-il celui de l'Eucharistie ?


L'annonciation nous révèle que c'est vraiment Dieu qui prend chair dans le sein de la vierge Marie : « Celui qui naîtra de toi, c'est le Fils du Dieu Très-Haut ! » dit l'ange Gabriel à Marie.
Ce qui s'accomplit à la messe, c'est ce même mystère qui s'est accompli en Marie: de même que la chair de Marie devient réellement et miraculeusement, par l'intervention de l'Esprit Saint, la chair du Christ, de même, le pain devient réellement et miraculeusement, par l'intervention de ce même Esprit Saint, la chair du Christ. Marie nous permet de comprendre qu'à la messe, se produit une intervention qui ne peut s'expliquer que miraculeusement, tous les père de l'Église en ont témoigné : l'hostie au moment de la consécration, c'est le miracle de l'Incarnation.
Allons plus loin : nous ne disons pas que le Christ devient du pain, ou qu'il s'incarne dans du pain ; c'était une hérésie qui s'était développée dans notre région au 13ème siècle, et que va démentir le miracle eucharistique de Douai en 1254. Ce n'est pas le Christ qui devient du pain, c'est le pain qui devient le Christ. Ceci est très important, car cela va nous permettre de comprendre, à travers le signe de l'Eucharistie, qui si le Christ vient nous rejoindre dans notre chair, c'est pour que notre chair soit divinisée.

2. Comment le mystère joyeux de la Visitation
préfigure-t-il celui de l'Eucharistie ?


Lorsqu'elle s'est rendue chez sa cousine Élisabeth, Marie a eu le pressentiment qu'elle était la nouvelle arche d'alliance, toute remplie de la présence de Dieu en personne; elle en reçoit la confirmation dans la salutation que lui adresse Élisabeth dès qu'elle franchit le seuil de sa porte. Les termes grecs qui expriment cette salutation, anéphonésen krogé mégalé (pousser un grand cri), sont exactement ceux que l'on employait pour vénérer l'arche d'Alliance et lui rendre un culte d'adoration.
Marie a bien conscience que si Dieu est venu habiter son cœur et tout son être, elle reste l'humble et petite servante qui ne peut que rendre grâce pour cette merveilleuse bonté qui pousse Dieu à intervenir en notre faveur en se donnant lui-même à nous. Si l'on a pris l'habitude aujourd'hui de définir la messe comme une célébration d'action de grâces, il nous reste à vivre cette action de grâces exactement à la manière de Marie, en ayant bien conscience que cette venue de Dieu en notre chair, c'est l'accomplissement de notre salut! Le cri de victoire qui monte du cœur de Marie : « J'exulte de joie en Dieu mon sauveur ! » donne le ton de toute la prière eucharistique de la messe; bien avant de proclamer que Jésus est mort et ressuscité, nous l'accueillons déjà comme sauveur.

3. Comment le mystère joyeux de la Nativité
préfigure-t-il celui de l'Eucharistie ?


Lorsque Marie a confié à saint Luc le récit de la naissance de Jésus, ce qu'elle met en évidence, ce sont les conditions de grande précarité qui ont entouré cette naissance : en pleine nuit, sous un abri d'animaux, Jésus est déposé dans une mangeoire et quelques bergers viennent le voir. Cependant, elle ajoute à ce récit un signe dont ces bergers furent témoins; le ciel s'ouvre, un ange apparaît ; il est porteur d'un message de paix pour tout le peuple ; il est rejoint par une foule d'autres anges qui louent Dieu et promettent la bénédiction pour la terre.
St Luc a noté à quel point il avait été impressionné par la façon dont Marie avait gardé tous ces souvenirs dans son cœur, comme si elle en vivait toujours ! St Luc écrit pour une communauté de chrétiens qui ont déjà pris l'habitude de célébrer l'Eucharistie ; il veut leur faire comprendre que la louange eucharistique qu'ils font monter vers le ciel n'est qu'une participation à cette louange que les anges ne cessent d'adresser à Dieu et que Marie continue d'entendre dans son cœur. Marie a fait comprendre à Saint Luc que la qualité de la prière et de la louange de nos assemblées eucharistiques ne dépendent ni du nombre ou de la qualité des personnes qui se rendent à la messe, ni de la richesse ou de la vétusté d'un édifice religieux ; c'est toujours au ciel que la messe est célébrée, en face du trône divin, en présence de l'Agneau, des anges et des saints. C'est Marie la première, l'a compris et voudrait nous le faire comprendre, elle que la grande précarité n'empêchait jamais de prier.

4. Comment le mystère joyeux de la Présentation de Jésus au Temple
préfigure-t-il celui de l'Eucharistie ?


Lorsque Joseph et Marie montent au Temple, c'est pour un rite sacrificiel, celui de la circoncision ; ce rite signifie que ce qui est donné ou consacré au Seigneur ne nous appartient plus. Marie et Joseph offrent ensemble deux petites colombes, signe de leur amour mutuel ; ainsi, c'est toute leur vie, le meilleur de leur vie qui est offert à Dieu ; mais Marie va plus loin ; elle remet son enfant dans les bras de Siméon, en sachant que Siméon attendait la venue du rédempteur ; elle lui remet donc son enfant, comme le moyen par lequel sera obtenue la rédemption, comme Abraham avait présenté son fils Isaac en sacrifice.
Dans la grande prière eucharistique, le prêtre nous présente au Père en disan t: « regarde cette offrande et daigne y reconnaître celle de ton fils ! ». A la messe, nous ne nous appartenons plus ; nous appartenons au Seigneur. Nous sommes invités à chaque messe, non pas à venir faire une offrande, mais à faire de notre vie une offrande que Dieu pourra accepte r; St Paul nous y invite avec vigueur au chapitre 12 de sa lettre aux Romains : « frères, je vous exhorte, au nom de la miséricorde divine, à vous offrir vous-mêmes en sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu ». Il précise de quelle manière : « Ne vous laissez pas modeler par les idées du monde actuel, mais cherchez à découvrir la volonté de Dieu: ce qui est bien, ce qui lui est agréable, ce qui est parfait ! » 

5. Comment le mystère joyeux de Jésus perdu et retrouvé au Temple
préfigure-t-il celui de l'Eucharistie ?


Lorsque nous méditons le 4ème mystère, nous découvrons qu'un jour, Marie et Joseph ont connu une grande angoisse le jour où ils ont découvert que Jésus n'était plus avec eux. Que lui était-il arrivé ? Dans ces cas-là, on se pose mille questions ? Ils ne le retrouvent pas, dit l'évangile ; il ne leur reste plus qu'à se rendre au Temple pour y prier, se soumettre à la volonté de Dieu ; et c'est à ce moment-là, alors qu'ils ne s'y attendaient pas, qu'ils le retrouve, mais c'est tout juste s'ils le reconnaissent, car ce n'est plus un jeune garçon, c'est un maître qui converse à égalité avec les docteurs, c'est un prophète qui s'adresse à eux avec toute l'autorité divine: « ne saviez-vous pas ? » leur dit-il...
Juste après la consécration, ce moment où Jésus vient se rendre présent dans l'hostie, à la prière du prêtre, par l'action de l'Esprit Saint, l'assemblée chante : « nous proclamons ta mort, Seigneur Jésus, nous célébrons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire ! » Pourquoi nous faut-il encore attendre et chercher celui que nous croyons présent dans l'hostie ? Lorsque Jésus meurt, les disciples sont tristes de l'avoir perdu; lorsqu'il apparaît à ses disciples, ceux-ci se réjouissent de le retrouver, mais ils sont saisis de crainte en le voyant, car sa divinité leur saute aux yeux; lorsqu'il monte au ciel, ils le perdent à nouveau, mais ils savent alors qu'il est Dieu et ils espèrent le retrouver dans la gloire... A chaque messe, Jésus se rend présent au milieu de nous et nous célébrons cette présence au moment de la consécration ; mais Jésus n'est pas notre petit bébé à nous ; tout aussitôt donc, la prière eucharistique nous fait lever les yeux au ciel pour confesser sa divinité et attendre sa venue dans la gloire ; et lorsque nous le retrouvons au moment de la communion, ce n'est pas seulement pour être comme dans un petit cocon avec lui, c'est pour ensuite être envoyé par le célébrant afin de chercher à découvrir sa souveraineté, sa présence dans le cœur de nos frères les plus différents de nous, et parfois même les plus opposés à nous. C'est pourquoi, Jésus se tient toujours caché sous le voile de l'hostie, derrière la porte du tabernacle ou dans le visage de mes frères les plus démunis.

6. Comment le mystère lumineux du Baptême de Jésus
préfigure-t-il celui de l'Eucharistie ?


Entrons maintenant, si vous le voulez bien, dans la compréhension des mystères lumineux. Comment sont-ils lumineux ? Lorsqu'ils sont contemplés à la lumière de l'Eucharistie.
Contemplons le baptême de Jésus : à ce moment-là, comme à la messe, le ciel s'ouvre, le Père nous parle, l'Esprit Saint descend. Il descend sur Jésus comme il descend sur le pain et le vin, comme il descend sur toute l'assemblée pour la faire entrer dans la lumière de la divinité. La mère de Jésus aurait-elle pu être présente au moment de son baptême ? Ce n'est pas dit; mais en vérité, ce n'était pas nécessaire, puisque Marie avait déjà vu le ciel s'ouvrir au moment de l'annonciation. Parce qu'elle est conçue sans péché, Marie, en vérité, a toujours vécu à ciel ouvert, dans la lumineuse présence de Dieu. Jésus dira un jour : « heureux les cœurs purs, ils verront Dieu ! ». Les évangiles nous disent que parmi les témoins présents au baptême de Jésus, seul Jean le Baptiste a pu voir la colombe descendre du ciel. C'est qu'il avait le cœur pur. Et lorsque Jean enseignait, il préparait les cœurs à la nécessité d'être purifiés, pour être prêts à reconnaître et à accueillir le salut ! Toute sa prédication se référait à l'enseignement du prophète Isaïe, celui qui a le plus vigoureusement réclamé et attendu et décrit la purification de toutes les souillures du péché.
Puissions-nous, grâce à Marie et à Jean-Baptiste, redécouvrir l'extrême importance de cette purification du cœur, qui nous rend apte à participer à la messe. Dans chaque célébration eucharistique, nous avons un rite pénitentiel qui nous invite à nous reconnaître pécheur, nous avons une première lecture qui a toujours pour fonction de nous inviter à une purification et à une conversion; nous avons un psaume qui nous invite à exprimer notre soif de purification; nous avons, juste avant le moment de la communion, la proclamation solennelle de Jean-Baptiste : « Voici l'agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » et l'invitation à demander la guérison de l'âme et du cœur.

7. Comment le mystère lumineux des noces de Cana
préfigure-t-il celui de l'Eucharistie ?


L'évangile de Jean nous dit que le miracle qui eut lieu aux noces de Cana fut le premier des signes accomplis par Jésus. Nous savons aussi que non seulement Marie était là, mais que c'est elle qui a donné à Jésus la raison pour laquelle la noce commence à mal se passer : « Ils n'ont plus de vin ! » lui dit-elle à l'oreille. L'absence de vin lors d'un mariage chez les juifs signifie que la joie ne sera pas au rendez-vous ; les prophètes avaient souvent prédit ce tarissement de la joie, lorsque l'on s'est éloigné du cœur de Dieu et qu'il ne nous reste plus que l'idolâtrie des plaisirs égoïstes. Jésus regarde les jarres dans lesquelles croupissent les eaux qui servent aux rites de purification. Le prophète Jérémie avait déjà décrit le dégoût qu'il éprouvait face à ces eaux mortes. Le premier acte de Jésus va consister à mettre à la place de ces eaux croupissantes une eau qu'il faut aller puiser à la source. La vierge va encourager les serviteurs à ce renouvellement des eaux, qui signifie le renouvellement des cœurs. C'est alors que ces cœurs vont être prêts pour la noce, la vraie, celle des épousailles du Christ et de l'Église, de Dieu avec chacune de nos âmes.
C'est à l'heure de la croix, nous le savons, que le Christ célèbre ses noces dont celles de Cana n'avaient été que le premier signe. A la messe, nous sommes conviés à la célébration des noces divines; au moment de la consécration le prêtre redit les paroles de Jésus : «  Ce vin des noces, c'est mon sang, le sang de l'alliance nouvelle et éternelle, versé pour vous et pour la rémission des péchés ». Si Marie était présente au pied de la croix, c'était bien pour accueillir et recueillir, en lui donnant son plein consentement, le mystère des noces de son fils ; il est donc nécessaire que Marie soit présente à la messe, pour y redire, en notre nom, la perfection de son oui, en réponse à la perfection de cette offrande d'amour divin.

8. Comment le mystère lumineux de l'annonce du Royaume
préfigure-t-il celui de l'Eucharistie ?



Si je vous posais la question : qu'est-ce qui constitue le cœur de l'annonce de la bonne nouvelle prêchée par Jésus ? Vous me répondriez, sans hésiter je suppose, la révélation du Père ! Jésus ne cesse de chanter et de proclamer que Dieu est son papa, notre papa du ciel, qu'il est infiniment bon, qu'il prend soin de chacun, que pas un cheveu de notre tête ne tombe sans sa permission. Ce Père l'a envoyé, lui Jésus, dans le monde pour franchir monts et vallées, à notre recherche, parce que nous avons pris des chemins dangereux, parce que nous risquons d'être la proie des bêtes féroces, et parce que nous allons tous périr de faim et de soif, prisonniers du péché ; il proclame que la volonté du Père, c'est que lui, Jésus, nous ramène tous dans le bercail de son cœur divin.
A la fin de l'un de ses enseignements, Jésus fait à ses disciples un de ses plus beaux cadeaux : il leur apprend à entrer en communion avec son papa, notre père du ciel. Cette prière que Jésus nous a transmis, arrive comme sommet de la prière eucharistique et comme ouverture pour la communion. Elle est proclamée solennellement non pas en privé, mais par toute l'assemblée. Comment la vierge Marie se rend-elle présente dans ce mystère ? En nous introduisant dans cette prière. D'une certaine façon, on peut dire qu'elle est la seule à pouvoir prononcer avec Jésus la toute première demande, parce que la sanctification du nom de Dieu n'est possible que si l'on est en état de grâce, avec un cœur tout immaculé, sans aucune trace de souillure due au péché. Cette première demande, la plus sublime, ne pouvait en toute logique, n'être prononcée qu'à la fin, comme lorsqu'un artiste a achevé son œuvre et qu'il peut alors la présenter au public. Si cette première demande peut être prononcée durant la messe, c'est parce que Marie, figure de l'Église, nous a précédés dans le royaume et qu'elle a le pouvoir, avec Jésus, de s'adresser au Père, au nom de toutes les créatures qu'elle représente.

9. Comment le mystère lumineux de la Transfiguration
préfigure-t-il celui de l'Eucharistie ?


La transfiguration de Jésus a lieu, dans l'évangile de Luc, après que Jésus ait invité ses disciples à le suivre jusqu'au bout jusqu'au don de sa vie sur la croix. Les autres récits de la transfiguration rapportés par les évangiles nous montrent que la transfiguration de Jésus est liée à la résolution qu'il a prise de donner sa vie en sacrifice pour le salut du monde. C'est à ce moment-là que Jésus apparaît à trois de ses disciples dans une lumière éblouissante et dans une atmosphère d'amour et de joie tellement belle que les disciples n'ont qu'une envie, c'est de rester sur cette montagne.
On pourrait se demander de quelle manière la vierge Marie a eu part à cette intensité de lumière, d'amour et de joie. La réponse de tous les grands mystiques est unanime : c'est lorsque Marie s'est unie à l'offrande de Jésus sur la croix. Le moment où Marie a souffert le plus fut paradoxalement le moment où elle a ressenti avec le plus d'intensité, la présence aimante et réconfortante du Père des cieux. Ils ont même ajouté que la plus grande joie du père à ce moment-là, c'était qu'elle avait consolé et dédommagé Jésus de toutes les ingratitudes de ceux pour lesquels il s'offrait en victime.
Nous pouvons maintenant nous poser la question : à quel moment de la messe sommes-nous appelés à vivre cette joie de la transfiguration ? La réponse est simple, directe, et vous l'avez devinée au terme de ce parcours : c'est au moment où nous recevons le corps de Jésus pour nous unir à lui, à ses souffrances, à sa passion, à sa mort et à sa résurrection. Lorsque nous nous unissons à lui pour compléter en notre corps ce qui manque à ses souffrances, lorsque nous nous unissons à lui pour que nous puissions devenir, auprès de tous nos frères vers lesquels l'Esprit Saint nous enverra, le sacrement de son amour.

AMEN

Article publié par MICHEL LAISNE • Publié le Jeudi 07 juin 2012 • 1665 visites

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