Le jeûne...

Alors que le carême arrive à grand pas, une première réflexion sur le jeûne... Qu'en penser ? que faire ? Le Père Amar du diocèse de Versailles nous propose cette méditation.

Pourquoi jeûner ?

Long white rice on plate isolated on white

Lettre à des catholiques - et aux autres - qui pensent que les jeûneurs sont des
gêneurs.

 

Bonne nouvelle : à l’heure du tout, tout de suite et pour pas cher, l’Eglise propose un remède
radical : le jeûne. La recette serait même un peu tendance ! Ne l’avez-vous pas remarqué ? Le
jeûne a pris ces dernières années un véritable coup … de jeune ! « Jeûne thérapeutique », « jeûne
et randonnée », « remise en forme par le jeûne » ; allez sur Internet ou dans les revues de santé en
tout genre et vous serez surpris de la promotion en faveur de cette pratique plurimillénaire à
laquelle le Judaïsme, et dans son sillage la toute première Église, ont donné un sens spirituel et
religieux.


Pour autant, le jeûne chrétien n’est pas thérapeutique ou hygiénique même s’il peut avoir des
effets positifs sur notre corps. Le jeûne suppose une attitude de Foi, d’humilité, de totale
dépendance par rapport à Dieu. Dans son dernier message de Carême, Benoît XVI insiste sur ce
point : « le jeûne est sans nul doute utile au bien-être physique, mais pour les croyants, il est en premier
lieu une « thérapie » pour soigner tout ce qui les empêche de se conformer à la volonté de Dieu. »
L’objectif visé n’est donc ni l’exploit - possible source d’orgueil - ni la souffrance qui amoindrit
notre être quand elle n’est pas remplie d’amour. L’objectif du jeûne est le plus d’attention et
d’ouverture à l’autre : Dieu et mon prochain. Lorsque j’accepte un manque je me découvre
dépendant : de Dieu et de sa Parole d’abord, mais aussi des autres. La qualité des relations me
devient absolument nécessaire … l’autre devient ma vraie nourriture !


Je vois poindre en vous des interrogations : il n’y a pas de mal à se faire du bien n’est-ce pas ?
Pourquoi me priverais-je de quelque chose qui n’est pas mal en soi ? Le polyphénol contenu dans
le chocolat est même bon pour la santé : tous les pharmaciens le disent !


C’est très simple : jeûner, ce n’est pas en soi se priver de chocolat, c’est surtout vérifier qu’on est
libre par rapport au chocolat. Voilà peut-être la raison pour laquelle le monde n’aime pas le jeûne
et que les jeûneurs sont des gêneurs ! Parce qu’ils contestent silencieusement la loi totalitaire du
désir qui est le ressort le plus puissant de notre société marchande. Regardez : il y a des chaînes
partout ! Chaînes de montage, chaînes de magasins, chaînes de télévisions.
Jeûner c’est vérifier que ces chaînes extérieures ne se sont pas à la longue intériorisées, conduisant
à la paralysie et à l’asphyxie de l’âme.


Le jeûne peut également nous enseigner la modération des nombreux autres appétits qui habitent
en nous et qui peuvent conduire à commettre le mal. Car si vous apprenez à renoncer à manger
lorsque vous avez faim – dans certaines limites bien entendu ! – vous découvrirez qu’il est possible
de renoncer aux péchés que certaines situations nous poussent à commettre. En ce sens, le jeûne
est une ascèse du besoin et une éducation du désir. Il nous amène à accepter de ne pas avoir tout,
tout de suite et par quelque moyen que ce soit.


N’en déplaise à tous ceux qui pensent que le carême est l’équivalent du « ramadan des chrétiens »,
le jeûne n’est donc pas une grève de la faim pour faire plier Dieu ! C’est plutôt Dieu qui nous
permet de nous faire plier nous-mêmes, pauvres êtres ligotés à des dépendances dont nous
sommes trop souvent complices. Finalement, le jeûne est la correction d’un jeu de rôle : à ce
« moi-moi » sans cesse affirmé et revendiqué il appelle un « Toi-Toi » : le Dieu d’Amour et de
miséricorde qui attend que nous lui fassions un peu plus de place pour mieux agir en nous.

 

Abbé Amar

 

sur : Padreblog

Article publié par Rémi Sprit • Publié le Lundi 08 février 2010 • 2528 visites

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